Mission 2008

Mission humanitaire, France – Maroc
12 au 26 avril 2008.

Samedi 12, Dimanche 13 et Lundi 14 avril :

Il est 11h00 samedi, lorsqu’un des camions signale une panne grave, alors que les deux sont chargés depuis la veille au soir et que le départ est prévu dans une heure…

Vendredi, toute la famille et les amis sont là pour nous aider à charger les dons dans les deux camions prévus au départ : Annick, Aziza, Marie-Odile, Roland, Babeth, Daniel et les 5 convoyeurs. Tout se déroule bien, l’organisation des chargements commence a être rodée et chacun met sa bonne volonté en action.

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Le soir, une fois les chargements terminés, Baptiste nous apporte les pizzas, Marie-Odile et Roland nous ont organisé tout le dîner. Tant de « douceurs » sont appréciées à leur juste valeur.

22h23, le dernier convoyeur arrive en gare d’Angers, après moult péripéties.

Samedi, pesée des camions pour éviter de partir en surcharge. Au retour, le camion Europcar prêté gratuitement par Mr Thieullent de Biarritz 64, nous lâche…….

Tout le convoi est alors remis en question et chacun sent le stress monter tellement il est palpable, il est l’heure de partir et tout s’arrête.

Plusieurs personnes sont arrivées pour assister au départ, notamment les élèves de l’école Saint Germain de Juigné sur Loire et des membres de l’amicale laïque de Saint Barthélémy ; nous leur expliquons notre désarroi.

Après des heures passées au téléphone avec les garages alentours, les assurances, etc. Rien n’est arrangé, « le samedi midi en France, tout s’arrête ! »

Aucun moyen pour nous de savoir si la panne est grave ou non, si elle nous empêche de partir ou non.

La prudence nous pousse, à 16h00, à partir malgré tout, mais avec un seul camion après avoir complètement déchargé le second. Les trois convoyeurs sans camion prennent la voiture. La tension est incontestable, nous la ressentons dans l’air :

« Nous sommes déçus. A tous ceux pour qui l’espoir repose sur nos épaules, en France, au Maroc, aux amis, aux inconnus qui comptent sur nous. Sachez que nous avons fait tout notre possible. Il devait être écrit qu’un seul camion de dons partirait cette année. »

La meilleure volonté du monde ne suffit pas toujours !

Un départ sur trois pattes malgré tous les encouragements, merci à tous ceux qui ont été présents par leur soutien téléphonique entre autre, mais aussi leur accueil ; Christelle, notre marraine, un accueil hyper chaleureux.

La route, toujours aussi longue…
« A quand le Marocco-tunnel ? » Thibaut

La douane aussi nous réserve des surprises, pas toujours bonnes, le camion met 6 h30 à passer.
C’est épuisant, nerveusement, psychologiquement, et après le départ difficile, chacun de nous se pose des questions quant à la suite de notre périple.

Malgré tout, nous faisons la rencontre de Driss et Mouhcine, ils nous font relativiser l’attente et nous conduisent au siège de leur association.
Bien qu’épuisés par le trajet, et les obstacles de départ, nous vidons le matériel du camion d’Aubance Location 49 loué par Mr Cesbron, destiné à Action Urgence, à Rabat, il se fait tard et nous sommes hébergés chez la présidente par intérim de l’association, Mme Zekraoui.

Mardi 15, Mercredi 16, Jeudi 17 avril :

Ce n’est que ce matin que nous comprenons l’importance de vos dons en matériel médical. En effet, parmi les convoyeurs, aucun n’est professionnel du monde médical ; mais aux réactions de joies, d’étonnement et d’excitation, que l’ouverture des cartons provoque ; nous prenons conscience du besoin fondamental des équipes médicales.

Nous voyons trois personnes du monde médical redevenir « enfants » devant les produits et matériels apportés. Ils nous détaillent leur zone d’action, les hôpitaux mobiles d’où ils travaillent…

Association Action Urgence est intégrée à nos nouveaux contacts de l’année. (voir en fin de journal)

Nous quittons Rabat direction Khouribga.

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L’accueil ne ressemble pas à celui que nous connaissons et nous sommes un peu déstabilisés.

Les dons destinés à l’association Mohammadia des œuvres sociales n’ont pas pu quitter Juigné sur Loire…

Fatima Jalil toujours aussi souriante, nous retrouve, nous la suivons pour visiter le centre dont elle est responsable depuis cette année et dont elle nous avait parlé lors de notre dernier passage : Complexe Socio-Educatif pour jeunes filles.

Nous lui confions le matériel qui leur est destiné, puis elle nous fait part de ses demandes modestes pour l’année prochaine. Entre autre, des vélos pour les jeunes filles afin qu’elles puissent se rendre à leurs cours, de manière plus rapide et plus sûre.

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Fatima nous réserve un cadeau d’exception pour sceller cette amitié durable : un dessin au henné pour chacun de nous, mains pour les femmes et épaule pour les hommes, en prenant soin de nos peaux d’européens. Un grand merci à toi Fatima. Yves, Gérard, Thibaut et Mickaël portent un scorpion ; Bernadette et Karine, des dessins fleuris.

Nouvelle rencontre : L’Association d’Education et d’Assistance aux Diabétiques de Khouribga.

Nous retrouvons également Fouzia Tourati, la kinésithérapeute que nous soutenons dans son travail auprès des enfants ; elle accepte à notre arrivée de nous montrer les soins qu’elle apporte à cet enfant rééduqué à 90 %, et qui a tout juste 1 an. Elle est heureuse que nous ayons pu lui apporter les quelques bandes d’élastoplastes que nous avions récoltées.

Nous nous rendons à Bejaad, où la coopérative de tisseuses des tapis fonctionne toujours, nous effectuons nos achats et déposons quelques tricots pour bébés, car deux des tisseuses sont de futures mamans ; toutes nos félicitations.

Nous quittons la région de Khouribga pour retrouver Tidilit, sur une route en travaux, les kilomètres paraissent encore plus longs ; nous risquons de peu l’enlisement des deux véhicules puis nous effectuons une marche arrière qui paraît interminable sur une route de chantier !!! mais de chantier marocain !!!

Rien n’indiquait l’impasse où nous pensions continuer notre route.

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Nous arrivons enfin à Tidili le soir, un tajine nous attend pour le dîner, grâce à Mustapha, notre hôte du week-end et notre ami.

Vendredi 18, Samedi 19, Dimanche 20 avril :

Un petit week-end d’émotions, avec un passage à Marrakech.

Un peu d’histoire :

La ville de Marrakech fut fondée en 454 de l’Hégire, ce qui correspond à l’an 1062 ; par Youssef Ibn Tachfin, premier souverain de la dynastie Almoravide.
Les Almoravides sont une dynastie berbère issue du Sahara. Ils y règnèrent ainsi que sur une partie du Maghreb et une partie de la péninsule ibérique, pendant le XIème et le XIIème siècle.
En 1147, les Almohades, s’emparèrent de la ville, et détruisirent la presque totalité des monuments, et exterminèrent les Almoravides. Ils construisirent, cependant, la Koutoubia, célèbre mosquée ; sur les ruines d’un palais almoravide.

Nous suivons le projet de crèche à Tidili Mesfioua, rien n’a progressé. Pour eux aussi, l’avancée a été difficile, c’est une année sèche, rien ne pousse, les dépenses sont donc réservées aux achats de survie et non à la construction.

Malgré tout, 25 à 30 enfants sont accueillis dans une crèche provisoire et attendent l’ouverture. Nous souhaiterions les aider dans ce projet pour leurs enfants. Les travaux représentent environ 6000.00 euros pour terminer le toit, les fenêtres, les toilettes, l’eau, l’électricité.
« L’enfant, c’est l’avenir » Rachid

Il nous formule ses demandes en ardoises, craies, cahiers, stylos, jeux pour leur crèche,…
Et nous remercie des dons apportés, le bureau de l’association va se réunir et décider des conditions de la distribution.

L’école dont dépend le village de Tidili, est celle d’Aït Ourir. Elle aussi a de gros besoins en matériel scolaire, nous envisageons un échange.

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Nous recherchons toujours plus de contacts, sur la route de Ouarzazate, nous découvrons des paysages magnifiques.

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Lundi 21, Mardi 22, Mercredi 23, Jeudi 24 avril :

Ahmed de l’école de l’Ourika est heureux de nous revoir ; et même si rien ne lui est destiné dans le camion, nous attendons quelque chose de bien précis.

Après plusieurs contacts, une classe de 4ème du Lycée Comte de Foix de la Principauté d’Andorre, dont Mme Faisy est professeur, est venue vivre une semaine auprès des élèves de l’Ourika et a été logée dans les familles. Nous sommes impatients de connaître les impressions car les élèves rentraient au moment où nous arrivions au Maroc, nous ne savons donc encore rien de l’échange.

« Très riche et très fatiguant » Ahmed. Les enfants des deux pays ont vécus des moments inoubliables de partage ; des ateliers ont été mis en place à cette intention : poterie, chant, informatique, match de football,…
Chacun est reparti à la fin de la semaine avec la tête emplie de souvenirs, le cœur chargé d’émotions, et un attachement comme un fil invisible qui relie désormais les pays et les enfants.

Nous sommes très heureux d’avoir pu contribuer à ce bonheur, en mettant tout simplement en contact les personnes qui allaient le mettre en marche. Notre marraine a relayé leur demande que nous avons transmise sur place l’an passé.

Retour à Rabat où nos nouveaux amis nous attendent impatients.

Nous sommes conduits au service de réanimation. Alors que « l’administration a baissé les bras, le service ne vit que des dons ». Les médecins responsables planchent donc à l’heure actuelle sur les statuts de l’association qui va pouvoir les faire sortir de cette impasse. Nous écoutons attentivement leurs besoins.

Nous avions tous les six été frappés, il y a quelques jours, du manque ; de l’inexistence de matériel dans un hôpital de capitale.

Les couloirs que nous traversons laissent exploser à nos yeux le dénuement le plus total. Bien sûr le personnel est là, mais que peut-il faire sans matériel ? A l’entrée déjà, le service de sécurité nous avait frappé ; nous connaissons déjà tout cela, mais pas dans la capitale du pays ! Comment imaginer ?

Si vous suivez mon parcours dans ce dédale de couloirs vides et de salles d’examen entre-ouvertes, comme des bouches affamées qui attendent la moindre miette qui pourrait apaiser leur faim. Regardez ces hommes et ces femmes, le regard égaré qui ne savent plus ce qu’ils cherchent ou alors tellement implorant que notre bien-être nous rend mal à l’aise, nous avons l’impression d’être détenteur d’une richesse invisible, impalpable.

A la sortie, face à l’hôpital, le terrain hippique ; pelouse verte et tondue, arrosée par temps chaud pour préserver son bon état ; à deux pas, des hommes et des femmes, des enfants même, attendent des soins qu’ils n’auront peut-être jamais faute de matériel.

Le contraste est assourdissant, à tel point que seule l’entrée de l’hôpital est gardée, le green est à portée de main. Comment comprendre les hommes ? Seule une route sépare la plus extrême pauvreté aux excès les plus extrêmes…

Nous nous permettons un écart touristique avec notre guide particulier, Driss, infirmier et membre de l’association Action Urgence.

Un peu d’histoire :

Rabat est fondée en 1150 par Abd Al-Moumin, sultan almohade, sur l’emplacement d’une bourgade almoravide. Son petit fils fait ériger une citadelle, base militaire solide pour des expéditions en Andalousie ; la ville est nommée : Ribat AL-Fath, la forteresse de la Conquête.

La tour Hassan, minaret de la tour de la mosquée du même nom, date du XIIème siècle, aurait dû culminer à 80 mètres, elle n’en atteint que 44. A son pied s’étend un parterre de colonnes érigées par un sultan, qui suivant son ambition souhaitait qu’elle puisse contenir son armée entière, nous comptons aujourd’hui 312 colonnes. Les travaux furent arrêtés à sa mort en 1199.

Le mausolée de Mohammed V, tout est luxe. Il contient le sarcophage royal d’onyx blanc pakistanais, sous une coupole d’acajou et de cèdre du Liban, doré à la feuille. Y reposent aussi Hassan II et son frère Moulay Abdallah.

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Rencontre avec l’Association Mounia El Amal Culturelle, Sportive et Sociale.
Ses membres nous expliquent que cette association est née du désir d’une femme de soutenir les personnes nécessiteuses, leur local visité, nous écoutons les besoins, qui nous paraissent correspondre avec vos dons.

L’Association Mounia El Amal Culturelle, Sportive et Sociale est intégrée à nos nouveaux contacts de l’année. (voir en fin de journal)

Il est temps pour nous de rejoindre Assilah, découvrir l’école du bidonville.

Effectivement l’école est la frontière entre la ville et le bidonville. Jour de grève, eh non, la France n’a pas ce monopole.
Nous rencontrons portant un professeur qui nous explique que cette école n’a pas de moyen hormis des donateurs qui se font rares. Chaque année, les professeurs investissent une partie de leur salaire dans l’école ; ils peuvent ainsi financer de rares livres ou cahiers, pas plus.
Sa classe est ouverte et malgré sa réticence nous jetons un rapide coup d’œil.

Je comparerais ce que nous voyons à une classe abandonnée par tous et vidée de son contenu pour les congés d’été. A la seule différence qu’elle est occupée régulièrement par les élèves mais seule la propreté des locaux l’indique, tant le matériel est inexistant.

Avant d’arriver à la crèche, nous comprenons la vie de ses enfants ; trois d’entre eux sont là à attendre que quelqu’un leur donne de l’eau pour leur famille. Boutéina, la sœur d’Aziza qui soutient notre association en France, remplit leurs bidons. Ils n’ont pas plus de 3, 4 et 5 ans et transportent des bidons d’eau plus lourds que les cartables de collégiens français ; sans un mot, ils rentrent « chez eux », pieds nus.

A peine assez de chaises pour tous et aucun jeu. Voilà comment résumer la crèche qui accueille pourtant les enfants de deux à six ans. Les normes européennes sont respectées ici aussi, aucun d’entre eux ne peut se blesser ; mais aucun ne peut jouer non plus.

Nous offrons à la directrice toutes les peluches qu’il nous reste, c’est l’hystérie. Même elle n’en revient pas et son émotion nous touche, tout comme celle des enfants qui deviennent en un instant « des enfants ». Des sourires, des cris, des rires, une excitation envahit la pièce, qui paraît tout à coup trop petite.

Si les associations des parents peuvent faire le lien, nous les compterons désormais dans nos distributions. Les dons restant pour l’école seront distribués quelques jours plus tard sous la bienveillance de Boutéina.

Un peu d’histoire :

Asilah, ville côtière, colonie Romaine, puis ville Arabe, elle résiste aux Normands, avant de tomber aux mains des Espagnols. Les Portugais s’en emparent pour ouvrir leur route de l’or ; mais les Espagnols la reprennent. Au début du XXème siècle, elle est conquise par un tyran, devenu maître du port stratégique, Raissouni avait été appelé par la population qui voulait se débarrasser de la tyrannie du pacha. Il sera, lui-même, renversé par les Espagnols.

Asilah accueille chaque année le festival culturel, au mois d’août.

Vendredi 25 et Samedi 26 avril :

Voilà ! Route vers Tanger, la douane marocaine, le bateau, la douane espagnole, la traversée de l’Espagne, puis la France. Escale chez Christelle que nous espérons revoir avant l’année prochaine.
Et après 6000.00 kilomètres, arrivée à Juigné sur Loire, les valises poussiéreuses, le cœur gros, les corps fatigués, les esprits et les pensées toujours là-bas.

Quoiqu’il y ai pu avoir de tensions et d’accrochages, une mission humanitaire demande toujours énormément de la part de tous les convoyeurs, et malgré les incidents par lesquelles celle-ci a démarrée ; l’humeur chaleureuse a su demeurer. Grâce aussi à l’humour de Gérard qui a su nous redonner le sourire chaque fois qu’il nous a demandé « un petit jambon-beurre !!»

Je remercie les convoyeurs de cette mission, qui malgré toutes les remises en questions dues aux difficultés rencontrées, malgré la remise en cause d’une année entière de travail, et quasiment de l’existence de l’association ; ont su mettre à profit les rencontres et les obstacles pour les transformer en tremplin de courage pour la nouvelle année qui se dessine à l’horizon.

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Christelle : merci pour ton sourire et ton accueil si chaleureux